Le journal d'une cochonne

131 Lesbienne ?

OK alors là, je suis obligée d’écrire là. C’est pas possible.

J’étais dans la voiture avec ma mère aujourd’hui, et elle rabâchait encore inlassablement sur mon père quand soudain elle me dit : "Ne choisis pas un mec comme lui."

Ceux à quoi j’ai répondu, putain je ne sais même pas pourquoi j’ai dit ça, mais je l’ai dit : "Je te rappelle que je suis plus portée sur les femmes que sur les hommes."

Et là, j’ai eu droit à la même question qu’à mon anniversaire : "Mais alors, tu es même pas bi, tu es vraiment homo ?"

Je ne sais pas si vous pouvez vous imaginer… Enfin je veux dire, ma mère n’est pas homophobe mais… Cette question… Elle m’a, je ne sais même pas comment le dire…

J’ai vaguement répondu un rapide "Je sais pas" et c’est là que les choses ont commencée à devenir blessantes… Je vous restitue le dialogue comme je m’en souviens à peu prés, en commençant par moi :

"Je sais pas."

"Comment ça tu sais pas ?"

"Ben… Je sais pas..."

"Mais si tu sais !"

"Mais, non!"

"Mais si, ça c’est un truc qui se sait !"

"Ben, visiblement non, je suis pas sûre, qu’est-ce que j’y peux ?"

"Mais là t’es obligée d’être sûre, tu le sais, ça relève de la sexualité, donc tu le sais !"

"Oui mais moi je ne sais pas."

"Mais tu dois être au moins bi, t’as déjà été amoureuse d’un homme une fois !"

"Quoi ?"

"Mais oui, rappelle toi, t’étais en seconde, tu m’en avais parlé !"

"Ah lui, non mais c’était rien ça, c’était juste un crush, j’étais pas vraiment amoureuse de lui."

"Ben c’est ça l’amour ! Tu penses à la personne, t’as envie d’être avec elle, tu ressens du désir physique..."

"Maman, j’ai pas envie de parler de ça avec toi...."

À ce moment là, il y a eut un silence qui a duré je dirais au moins 5 minutes, peut-être moins. En tous cas je me suis sentie mal. Apparemment, je n’ai pas le droit de douter de ma sexualité. Ma mère m’a rangé dans la case "homo refoulée", exactement ce que je ne voulais pas.

Et dire que je craignais ce qu’allaient penser mes amis, putain la pire menace c’est vraiment celle de son entourage.

En plus, ma mère ne croit pas en la bisexualité. Elle fait partie de ces gens qui disent "il y a que des homos et des hétéros et ceux qui se disent bi le font pour cacher leur homosexualité parce qu’ils ont honte."

Don pense comme ça aussi.

Il y a une ou deux semaines, j’ai vaguement essayer d’expliquer à ma mère que je me sentais émotionnellement attirée vers les filles, mais pas forcément physiquement, et elle ne me comprenait pas. Elle dit que l’amour sans sexe n’est pas possible, que ce n’est que de l’amitié. Mais je n’ai pas envie d’être d’accord avec elle.

Dans le fond, je n’ai envie de coucher avec personne. Je me sens trop laide pour ça, en l’état actuel des choses, je ne veux montrer mon corps à personne, c’est l’unique raison pour laquelle je ne suis pas sexuellement active. Je l’ai déjà dit au moins mille fois, si j’étais jolie, si j’avais confiance en moi, je m’enverrai en l’air mais putain mais tout le temps.

Ensuite ma mère a dit : "Mais tu sais, tu peux le dire si t’es hom-, si t’es homo-, homo-, homosexuelle."

J’ai restitué son bégaiement. Elle a bégayer sur le mot "homosexuelle" putain. Et je suis sensée me sentir acceptée là ? C’est sérieux ? C’est sérieux, putain ?

Et pourquoi je n’ai pas le droit de ne pas être sûre… Pourquoi je suis obligée de me fixer… Déjà si mon corps ressemblait à quelque chose, tout serait plus simple ! Je pourrais essayer concrètement, mais là… J’ai baisé une seule fois, et je ne m’en souviens même plus, et c’était avec un homme… Je ne crois même pas avoir jamais parlé avec une fille qui se disait ouvertement lesbienne ! Des bi, oui, il y en a, mais je pense que la plupart des filles disent ça pour se donner un genre… Où sont les lesbiennes ?

Enfin, pour en finir avec ma mère, elle a ajouté : "Moi ça me pose aucun problème, mais alors là aucun, c’est ta vie, tu fais ce que tu veux."

Donc pour ma mère, je suis lesbienne maintenant. Géniale *soupire* ! Je devrais m’en foutre. Qu’est-ce que j’en ai à faire de ce qu’elle pense de toute façon, hein ?