Le journal d'une cochonne

118 Abus

Un jour, dans un parc, quand j’avais entre 5 et 7 ans je pense, deux enfants m’ont demandé de leur montrer mes parties génitales. Au début j’ai vivement refusé, mais ils ont insisté et ils ont dit que c’était pour un exposé. Je savais que c’était faux, je n’étais pas non plus totalement idiote. Mais j’ai finis par accepter. J’ai retiré mes vêtements et écarté les jambes, avec la peur constante que quelqu’un nous surprenne… Les deux enfants (une fille et un garçon) ont exprimé du dégoût en me regardant, pourtant quand je voulais me rhabiller, ils me demandaient de continuer à les laisser voir encore. Au bout de seulement une minute ou deux je pense, j’ai finis par leur dire d’aller se faire voir et je me suis rhabillé.

Je suppose qu’on fais des progrès. Je fais des progrès.
Je commence à m’expliquer certaines choses et ça semble faire du sens. Mon obsession pour la féminité, ma peur des hommes, l’excitation à l’idée de la soumission… Je trouve des explications, finalement !

Vous vous souvenez quand j’ai raconté ce qu’il m’était arrivé avec ce petit garçon quand j’avais entre 6 et 8 ans… Qu’il m’avait forcée à le lécher ses parties intimes, qu’il avait fais la même chose sur moi et qu’il semblait bizarrement être obsédé par l’idée qu’on se marie tout les deux plus tard.

Il y a eu un moment où ça a changé, un moment où j’ai voulu ce qui est arrivé. Peut-être même que je le voulais depuis le début ! Sûrement, peut-être, je n’en sais rien…

Je me rappel aussi qu’un jour, quand j’avais peut-être 11 ou 12 ans, je pleurais parce que je me sentais moche. Enfin, vous voyez, je faisais plus ou moins une crise d’adolescente pré-pubère en mode "personne ne m’aime et je suis mooooche". Seulement j’étais inconsolable. Ma mère, au bout d’un moment, a fini par lâcher l’affaire en voyant que je ne me calmais pas, elle a demandé à mon père de me parler. Il m’a fait tout un speech dans lequel il n’y avait pas que du mauvais. Par exemple il m’a expliqué plus ou moins maladroitement qu’on avait tous un certain dégoût de soi-même à l’adolescence et que les autres ne nous voient pas de la façon dont on se voit soi-même.

Mais au milieu de tous ça, je me souviens très clairement qu’il a dit "De toute façon, dans notre société actuelle, c’est mieux d’être moche, tu crois que les hommes veulent violer les moches ? Ils préfèrent violer les filles belles !"

Bien sûre, il voulait simplement dire que la beauté amène son lot d’inconvénient. Mais comment voulez-vous qu’une gamine de 12 ans interprète ça ? Bien sûre, j’ai pensé que c’était une confirmation du fait que je n’étais pas jolie. Après ça, je n’ai plus jamais exprimée cette insécurité là auprès des autres, de peur qu’on me confirme qu’effectivement, je ne suis pas un mannequin.

Enfin, tous ça pour dire que ça explique certaine chose, surtout cet espèce de désir que j’ai d’être "abusée". "Les hommes ne violent que les jolies filles", "si tu n’es pas violée, tu n’es pas jolie" peut-être que c’est tout ce que j’ai retenu de ce qu’il m’a dit. Peut-être que ça s’est gravé en moi malgré le fait que je sache très bien que c’est faux. Parce que évidemment, c’est faux. Je ne suis pas bête, je le sais.

Je sais très bien qu’être violée ne fait pas du bien. Pour les rares où j’ai manifesté mes angoisses dues au fait que je suis aussi excitée par l’idée du viol, on m’a dit qu’il n’y avait pas de quoi, que c’était un fantasme courant et que je ne voudrais pas que ça m’arrive en vrai. Mais je… Et si je voulais vraiment que ça m’arrive ?